[ N°12 ] UN SECRET BIEN GARDE
Un vestige Gallo-Romain, sous le château !
≡ Un bruit assourdissant
Dans la nuit du 4 au 5 novembre 1994, les habitants du quartier du château sont réveillés par un bruit assourdissant : le mur de soutènement de la terrasse occidentale vient de céder à la suite des fortes pluies de l’automne 19941.
≡ Effondrement du mur
Le mur, construit en même temps que la terrasse et la partie du château classique, en 1684, mesure 110 m de long sur une hauteur variable de 4 à 10 mètres. Il délimite la terrasse qui domine la vallée du Rieu.
L’effondrement s’est produit sur une quinzaine de mètres, dans la zone médiane de l’ouvrage, entraînant un éboulement de pierres et de terre dans la vigne de l’escarpe du mur. Le chemin de ronde devient dès lors impraticable pour les familles riveraines. De plus, le déversement des terres dans la vigne de Mme Fabre progresse régulièrement et pourrait même menacer les fondations du château.
≡ Conservation du patrimoine
Pour remédier au risque d’effondrement, des dossiers de subventions ont été accordés par la Région et la direction Régionale des Affaires Culturelles du Languedoc Roussillon.
Une étude du château, réalisée par le bureau PRIBETICH- AZNAR (2) étaye les points suivants :
1) Etablir un diagnostic général de l’édifice en évaluant son état structurel,
2) Prescrire un programme de travaux d’urgence de consolidation, d’amélioration ou d’entretien indispensables à la conservation de l’ouvrage,
3) Prescrire un programme éventuel de fouilles ou de sondages archéologiques.
≡ Travaux de réfection
La réhabilitation du site est confiée à l’entreprise Sarl DESPORTES3.
Le décaissement est réalisé sous la surveillance de MM ROUMIEUX et LAVERGNE. Celui-ci révèle la présence de céramique antique et médiévale. Il est rapidement apparu que le mobilier était issu de niveaux de remblais et dépotoirs remaniés au pied de la falaise. Aucune stratigraphie n’étant visible, l’intervention s’est limitée à la collecte et l’étude du mobilier archéologique.
Les éléments datables, formes et décors, ont été recueillis. Ils caractérisent deux phases distinctes d’occupation du sommet du Puech, dont nous retrouvons les déchets en contrebas4.
≡ Fouilles archéologiques
Si l’occupation médiévale est attestée depuis le tout début du 12ème siècle par les premiers textes mentionnant le castrum, rien ne laissait prévoir l’existence d’un site antique sur la hauteur. Or, un premier groupe de céramiques de 16 tessons se rattache à cette période ainsi que des fragments de tuiles de tegulae (5a) et d’imbrices (5b), matériaux de toiture romaine.
La vaisselle minoritaire, n’est présentée ici que par deux fragments d’ollas (6) : une anse et un bord.
Les amphores (10 tessons) sont un peu plus nombreuses mais permettent une meilleure approche chronologique. Il s’agit de récipients vinaires, gaulois (7) et italique (8). Avec également trois fragments de panse d’amphore à huile Bétique (9), ce lot est caractéristique du tournant de l’ère (10).
Seule la présence d’amphores de type Dressel IA ou IB (11) (ci-dessous), dont les importations débutent vers 135 av J.C. pourrait laisser supposer une occupation remontant à la fin du 1er siècle avant J.C.
≡ Hypothèse
La présence de très nombreux tessons de dolium (12) et plus encore la quasi absence de vaisselle, permettent d’avancer l’hypothèse d’une vocation agricole de cet établissement, abandonné à la fin du 2ème siècle. La localisation de cette annexe, dont nous n’avons observé aucune structure bâtie, reste à préciser, probablement sous l’emprise du village qui coiffe la colline, ou tout au moins sous le château et le plan.
L’occupation du site ne reprend qu’au 11ème siècle, d’après la céramique recueillie. Aucun élément ne permet d’envisager une éventuelle occupation du Puech durant le bas empire et le haut Moyen-âge.
Abandon du site ou lacune documentaire ? La question reste en suspens...
- (1) Bulletin municipal décembre 2002.
- (2) Architectes du patrimoine.
- (3) https://www.google.fr/url?sa=i&url=http%3A%2F%2Fdesportes-renovation.fr%2Frenovation-aubais-sommieres-gard-herault%2Fmur-de-soutenement%2F&psig=AOvVaw0OVKUW-Q_b60PA46iDVjot&ust=1618156891054000&source=images&cd=vfe&ved=2ahUKEwiXg92mhvTvAhVI0uAKHfweCg8Qr4kDegQIARA8
- (4) Mathieu OTT, Histoire et Archéologie des Cantons de Lunel et Mauguio, 48 – Château d’Aubais (30), Nouveaux éléments archéologiques, Atelier d’Archéologie , 4 plan de l’olivier, 34400 Lunel., Primtemps 2003, pages 2 à 7.
- (5) 5a et 5b : (cf. photos) la Togula était dans l’antiquité une tuile plate. Une imbres (imbirces au pluriel) est une tuile d’une forme semi-cylindrique.
- (6) L’ Olla est un récipient ovoïde à fond plat, PY, 1993, 235, variante indéterminée du type 9n.
- (7) Fond annulaire.
- (8) Tessons dont une épaule de Dressel 1a ou 1b avec départ d’anse estampillée ML.
- (9) Actuelle Andalousie.
- Ier avant J.C. - 1er après J.C.
- PY, 1993, 54.
- Plus de 30 Kg.
Auteur : François Lavergne
Historien amateur, passionné et éclairé, François, co-Président de l'association, et par ailleurs aubaisien accomplit un formidable travail de recherche et de collectionne depuis de nombreuses années objets et documents relatifs à l'histoire d'Aubais. Conférencier et guide à ces heures perdues, son patient et minutieux travail de recherche est à l'origine de cette série Biblioteca Albassiana.